Chiara prend quelques notes sur son ordinateur, l’esprit rêveur. Elle peine à rester concentrée sur les mots de son professeur. Ce manque d’assiduité ne lui ressemble pas, mais son esprit est trop occupé à penser à la soirée qui l’attend pour réellement assimiler le cours. En fin de journée, elle doit rejoindre Erwin chez lui pour regarder des films. Une soirée comme ils en ont l’habitude. Pourtant, elle le sait, la jeune femme doit avoir une discussion sérieuse avec lui. Chiara s’est mise toute seule dans cette situation. Ce qui devait être un simple jeu pour attiser la jalousie d’Ezio prenait doucement une tournure inattendue. Si bien, qu’aujourd’hui, la frontière entre le semblant et le réel était beaucoup trop floue pour elle. Elle apprécie chaque moment qu’elle passe aux côtés d’Erwin et son attachement pour lui est bien réel. C’est pour toutes ces raisons qu’elle doit mettre fin à tout cela avant d’éprouver de vrais sentiments pour lui et d'en souffrir.

Quand les cours se terminent enfin, la jeune femme profite du temps qu’elle a devant elle pour passer à la colocation se doucher et enfiler une tenue propre. Un rapide coup d'œil à sa montre lui indique qu’elle a même le temps de passer à la boulangerie avant de se rendre chez Erwin.

Quelques kilomètres plus tard, Chiara sonne à la porte d’Erwin, une boîte de muffins sous le bras. Elle attend qu’il lui ouvre la porte et le salue de son plus beau sourire. "Salut toi !” Elle dépose un baiser sur la joue du beau brun et entre dans la maison. Elle abandonne ses talons dans l’entrée et dépose la boîte sur la table de cuisine. “J’ai tellement hâte de terminer les cours !” Elle est dans sa dernière année de stylisme. Si elle obtient son diplôme, Chiara rêve d’ouvrir sa boutique dans le centre-ville de Sedona pour y vendre ses propres créations. Elle s’installe ensuite sur une chaise puis porte son attention sur Erwin. Elle a l’impression de le trouver à chaque fois un peu plus charmant que la fois précédente. “Et toi ? Comment s’est passée ta journée ?”

Chiara se débarrasse de ses affaires dans l’entrée puis dépose la boite de muffins dans la cuisine tout en débriefant sur sa journée de cours. Elle sourit lorsqu’Erwin lui propose son aide pour son futur projet. Elle est tellement emballée par cette idée et le fait d’imaginer que le brun sera à ses côtés la rend étrangement joyeuse. « Oui c’est bien ça ! Plus que quelques mois avant mes derniers examens. » Chiara prend place sur une chaise de la cuisine puis attrape le verre que lui tend Erwin. Elle le remercie puis avale quelques gorgées d’Ice tea.

Erwin prend la parole à son tour et dépose un baiser sur la joue de Chiara. La jeune femme s’efforce d’ignorer le frisson qui parcourt sa peau. « Tu as raison, j’ai vraiment l’impression qu’un burger vient de m’embrasser… » Elle lâche un rire moqueur puis reprend son verre entre ses mains tout en regardant le jeune homme s’éloigner vers la salle de bain. Comme Erwin le lui a permis, Chiara décide de prendre son verre et de le poser sur la table basse. Elle jette un œil au canapé avant de s’y installer. « Salut Ishtar, comment ça va aujourd’hui ? » Le lynx lève légèrement la tête avant de replonger dans son sommeil, Chiara décide donc de s’installer sur la place libre du canapé. Elle allume la télévision sur une chaine de musique et attrape son portable pour faire le tour d’Instagram. Tout en scrollant le réseau, elle se questionne sur la bonne manière d’aborder la discussion. Tourner autour du pot n’a jamais été facile pour elle et elle a toujours tendance à rentrer dans le vif du sujet sans prendre de pincette. Erwin le sait bien. Elle se souvient encore de la manière dont elle lui a parlé de ce plan idiot.

Dans la salle de bain, l’eau se coupe. Chiara en déduit qu’Erwin doit être sorti de la douche. Elle se lève du canapé le temps de ramener la boite de muffins sur la table basse du salon puis retourne à sa place, laissant de côté son téléphone cette fois-ci. « Erwin, j’aimerais te parler de quelque chose. » Elle relève la tête, s’attend à voir le beau brun débarquer. « C’est important. »

Chiara observe en silence Erwin sortir de la salle de bain et prendre un muffin. Elle sourit et ne peut qu’approuver ses propos : Cette boulangerie fait les meilleurs muffins de Sedona. Ishtar vient ensuite s’installer sur les genoux de Chiara. Il y a encore quelques mois, la lynx gardait ses distances, mais il semblerait qu’elle accepte de plus en plus la présence de la jeune femme. Elle suit le dialogue d’Erwin avec son familier et caresse doucement la tête de l’animal. « Ne t‘inquiète pas Ishtar, on est deux à veiller sur lui maintenant. » Elle observe encore quelques secondes l’échange silencieux entre Erwin et son lynx, la magie et le don d’Erwin étant encore un concept assez flou pour l’humaine qu’elle est.

Erwin pose ensuite sa main sur les jambes de Chiara et elle ne peut s’empêcher de sourire devant sa bienveillance. Elle le rassure rapidement en posant sa main sur celle du jeune homme. « Non non, je vais bien. » Elle marque une pause, le temps de rassembler les mots justes. « Toute cette histoire pour rendre Ezio jaloux, c’était une idée stupide. » Elle baisse les yeux, repense aux événements qui l’ont poussée à agir ainsi. « On ne sera jamais ensemble. Il passe son temps à me piquer. » Elle fait un geste de la main pour chasser une mouche imaginaire. Ce discours semblait plus cohérent dans son esprit. « Enfin, ce n’est pas de Ezio dont je voulais te parler. » Elle se perd. Lâche doucement la main d’Erwin pour attraper son verre posé sur la table basse et boire quelques gorgées d’Ice Tea. Elle se tourne de nouveau vers Erwin et reprend son maladroit monologue. « Il faut qu’on arrête ce jeu. Je ne sais plus trop où j’en suis. Tout ce temps passé avec toi… Je t’apprécie vraiment et je sens que je m’y perds. » Elle plonge son regard dans les yeux noisette du brun. Elle ne sait absolument pas si ce qu’elle dit est compréhensible, mais elle doit le faire. « Désolée… Je me sens un peu bête, mais je pense que si on continue, je risque de ressentir autre chose que de l’amitié pour toi. » Elle ne peut pas être plus clair et elle sait que c’est le moment pour elle d’être sincère.

Chiara a pris son courage à deux mains pour dévoiler ses sentiments à Erwin. Elle avait voulu jouer avec le feu en mettant en place ce plan destiné à rendre jaloux Ezio. Le plan n’avait évidemment pas fonctionné, mais il avait en plus dégradé leur relation. Les deux amis se sont beaucoup disputés ces dernières semaines et Chiara ne sait plus trop comment faire pour arranger les choses. Pourtant, au milieu de cette pagaille, elle s’est attachée à Erwin, à leurs moments partagés, bien plus qu’elle ne l’aurait dû. Erwin lui apporte la stabilité et la paix, là où Ezio lui apporte tourments et colère. Chiara est bien consciente qu’elle n’a pas besoin d’une difficulté supplémentaire dans sa vie et qu’il est temps pour elle de se diriger vers une personne qui lui fait du bien, qui la tire vers le haut. Une personne comme Erwin.

L’étudiante ferme les yeux au contact du front d’Erwin contre le sien. Elle se demande ce qu’il veut lui dire. Elle n’a pas envie qu’ils s’éloignent, qu’ils perdent ce lien si précieux pour elle. Elle se laisse embrasser sur la tête puis réouvre les yeux pour faire face au visage du beau brun. Elle l’encourage d’un petit signe de la tête à prendre la parole. Ishtar est assise à côté et semble écouter la conversation. Erwin reprend la parole et ses mots font apparaitre un immense sourire sur les lèvres de Chiara. Elle doit surement avoir l’air niaise, mais elle s’en moque. Elle avait si peur que ses sentiments l’obligent à s’éloigner du beau brun, qu’elle n’a pas imaginé qu’ils pouvaient être réciproques. Elle pose sa main sur la joue d’Erwin et caresse sa peau du bout des doigts. « Je ne m’attendais pas à ça…Je suis trop contente. » Un petit rire gêné s’échappe de sa bouche et elle se penche pour embrasser longuement Erwin. « On peut oublier toute cette histoire avec Ez’ et se concentrer sur nous alors ? » Son regard pétille pendant qu’elle attend la réponse. Ce début de relation peut sembler un peu inhabituel, mais elle a le sentiment au fond d’elle que ça peut fonctionner.